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Les "galères"’ du football marocain : A qui imputer la responsabilité ?

A cette question beaucoup répondent généralement : ‘’Cest parce que le football est makhzénisé, le Général Benslimane et sa clique en ont fait une chasse gardée et ne font rien pour son épanouissement ; donc la faute est aux sécuritaires et… à Hassan II’’, etc. Ces genres de réponses, on en rencontre constamment. Dans la presse nationale surtout. Au point de devenir un lieu commun. Et si l’on sortait des sentiers battus pour situer les responsabilités des uns et des autres ? C’est ce que nous avons voulu faire en posant la question à un certain nombre d’observateurs avertis et des acteurs de la vie sportive nationale, à l’image de Najib Salmi, vieux briscard de la presse sportive nationale avec quelque quarante années d’exercice, ou encore de Mohamed Guertili, ex- membre de la fédération royale marocaine de football, etc.

A propos de l’avis selon lequel le goulot d’étranglement du ballon rond national se situerait au fait que ce sont les ‘’sécuritaires’’ qui sont aux commandes de la fédération de football, Najib Salmi sort de ses gonds et tape sur la table : ‘’Voilà tout le misérabilisme ! Le diagnostic est simpliste, superficiel : Qui a créé le Réal Madrid, plus grand club du monde ? C’est Franco. Qui est plus sécuritaire que Franco ? L’Argentine a remporté la coupe du monde avec des sécuritaires aux manettes, des tortionnaires même ! Ecoutez, ces raisonnements c’est dans l’air du temps. Et puis c’est une insulte à l’intelligence des Marocains que de leur dire que Benslimane prend leur football national en otage. Je n’accuse pas le système mais ceux qui l’acceptent. Et si le général est un homme fort c’est parce qu’il y a beaucoup d’hommes faibles’’. M. Guertili abonde dans le même sens, en fustigeant l’hypocrisie ambiante, rappelant que Benslimane a été élu à l’unanimité, que le roi Mohammed VI que le ministre des sports aurait contacté pour nommer le président de la FRMF aurait décliné la proposition en demandant aux votants de choisir la personne qu’ils croient capable de relever les défis du football national.

A ceux qui accusent le ‘’makhzen’’ de vouloir contrôler le ballon rond pour mieux contrôler le peuple en lui trouvant un dérivatif et lui faire oublier son difficile quotidien, M. Salmi rétorque que si cette hypothèse est vérifiable, alors c’est une politique qui a vachement échoué en ce sens que le peuple ne va même pas au stade !

Alors si crise il y a comme beaucoup aiment à le croire, où se situerait le problème ? Selon nos interlocuteurs, le football marocain avant d’être malade de quoi que ce soit l’est d’abord à cause de l’infrastructure quasi inexistante : ‘’Le public marocain s’en fiche de celui qui est à la tête de la fédération de football –qu’il soit soldat ou civil- Tout ce qu’il veut, c’est d’aller voir le match, avoir du bon spectacle, être bien accueilli, tout cela dans un cadre où il y a la sécurité. Mais il n’a rien de tout cela. D’ailleurs c’est casse-gueule que d’aller suivre un match, car on risque de prendre un caillou en plein visage’’. ‘’Il y a des clubs qui n’ont même pas de fax !’’, renchérit Mohamed Guertili.

Et Najib Salmi d’ajouter : ‘’Le budget de la FRMF est de 5 milliards de centimes (formation, déplacements, championnats inclus). Que pouvez-vous faire avec cette somme ? C’est la somme que perçoit Thierry Henry en quelques semaines ! Et puis quand on voit les clubs comme le Raja, grand club national, on est surpris qu’il n’ait que 65 adhérents même si officiellement ce chiffre est majoré ! Oui l’infrastructure est essentielle, et on voit que faute de cela, et à la moindre occasion, les joueurs se taillent, comme l’a fait Zmamâa’’. Autre problème relevé par M. Salmi, c’est qu’il estime que le football marocain est mal vendu : ‘’Maroc Télécom contribue au budget de la fédération à hauteur de quelque chose comme 2 milliards de centimes. Vous ne trouvez pas que c’est insuffisant dans la mesure où l’image de cette société est présente partout, sur les maillots, dans les stades, etc. ?’’ ‘’Oui répond M. Guertili. Mais il n’y a rien à vendre !’’

Donc le manque d’infrastructure, du reste rôle de l’Etat en grande partie, est la cause essentielle des problèmes que rencontre le football national. Et la presse nationale serait un élément de ce malaise, croit constater Najib Salmi puisqu’elle s’acharne à réclamer la tête de qui elle veut, souvent sans raison valable, comme elle l’a fait avec Louzani en 1993 alors que ce monsieur avait de bons résultats. Les responsabilités sont partagées, et il faut que l’Etat mette la main à la poche pour pouvoir réclamer en retour un football compétitif, avec une gestion contrôlée –peu importe le statut de celui/celle qui va diriger la fédération s’il est compétent- Pour le moment tout le Maroc du football attend ce sauveur providentiel. Impatiemment.

Bassirou Bâ
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