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UNESCO : Un film marocain censuré par l'ambassadeur du Maroc ?

L'ambassadeur Du Maroc auprès de l'UNESCO, Aziza Bennani, refusaient catégoriquement que le film, traitant d'un sujet portant atteinte à l'image du Royaume, soit programmé et qu'il devait être remplacé par « Ali Zaoua ».

Sale temps pour la représentation cinématographique des années de plomb au Maroc : « Mémoire en détention », le très bon film de Jilali Ferhati, qui visite avec finesse et sensibilité la période noire du Royaume, n'a pas fait mieux qu'une petite semaine dans les salles obscures malgré la réputation de solide faiseur de son auteur, et les critiques laudatrices rencontrées par le film. Une féroce concurrence à venir (le prochain film marocain est déjà dans les starting-blocks de la distribution, à savoir dans quinze jours tout au plus) et le déboulé en masse de quelques blockbusters hollywoodiens ont vite eu raison de ce qui est, certainement, le meilleur traitement filmique des années sombres du pays, condamné désormais à briller dans les festivals. Les festivals, tiens, puisque l'on en parle, là, justement.

« La chambre noire » de Hassan Benjelloun, opus librement adapté du roman éponyme de Jaouad M'Didech et tournant également autour du sujet qui semble actuellement fâcher (les années noires, donc), vient de vivre une mésaventure pour le moins déroutante, après avoir plutôt convaincu le public lors de sa vie dans les salles marocaines.


Refus catégorique

Après avoir décroché le Grand Prix du festival Africain de Khouribga, fait un saut par le festival du Caire et de Carthage et raflé l'Etalon d'Argent au dernier FESPACO se déroulant à Ouagadougou, « La chambre noire » devait faire le 17 mars l'ouverture de la 6ème édition du FIFET (Festival international contre l'exclusion et pour la tolérance) à Paris, manifestation tenue dans les bâtiments et sous l'égide de l'UNESCO.

Et c'est là où la polémique survint : d'après Hassan Benjelloun, son réalisateur, un appel datant du 12 mars et émanant de la directrice du festival, Claudine Drame, l'informait que l'ambassade du Maroc à Paris, ainsi que l'ambassadeur du Maroc auprès de l'UNESCO, Aziza Bennani, refusaient catégoriquement que le film, traitant d'un sujet portant atteinte à l'image du Royaume, soit programmé et qu'il devait être remplacé par « Ali Zaoua ». Ce que le cinéaste refusait d'admettre sachant que son film avait été financé par l'Etat marocain via le Fonds d'aide et surtout qu'il avait déjà été programmé sur la seconde chaîne nationale, 2M.

« Faux », s'insurge Mme Bennani, qui n'aurait jamais demandé l'interdiction du film (Claudine Drame affirme péremptoirement le contraire), mais seulement quelques corrections sur le dépliant. « Il y était marqué que « La chambre noire » était une dénonciation des arrestations arbitraires sous Hassan II. A aucun moment, le nom du Roi défunt n'est cité dans le film. Il aurait été plus juste de mettre le synopsis officiel, celui que l'on peut trouver sur Internet », affirme-t-on du côté de la représentation marocaine, qui souligne que « l'UNESCO est un organisme intergouvernemental qui ne saurait programmer un film portant atteinte à l'image de l'un de ses membres et que, pour ce film en l'occurrence, il aurait fallu le projeter en spécifiant bien qu'un processus démocratique était en cours dans le Royaume ».

Résultat, le Directeur général de l'UNESCO demandera à ce que l'on retire le logo de son organisme (« qui a été négligeant dans cette affaire », selon la voix marocaine). Et l'Ambassade du Maroc en France annulera la réception d'après-projection tout en demandant que la mention « avec le concours de… » soit retirée, arguant qu'il n'y avait « aucun accord écrit au préalable entre l'ambassade et la direction du festival ». Quant au film, il sera bien programmé, mais à quel prix ?

Amine Rahmouni
Source : Le Journal Hebdomadaire

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