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Maroc/Energie: Crise... de réformes

Le contexte actuel plaide largement en faveur de la nouvelle stratégie en matière de politique énergétique. Le Maroc est importateur net d’énergie, avec une dépendance totale de l’extérieur, estimée à 96%.

Premier constat. «Nous ne pouvons pas nous soustraire des effets pervers du contexte international», mettent en garde les professionnels. Le renchérissement continu des prix des combustibles fossiles au niveau mondial conforte leur crainte. D’autant plus que la demande en énergie électrique a atteint 21,1 TWH en 2006, correspondant à un taux de croissance des besoins de 8,1%. La projection table sur 27 TWH à l’horizon 2010. Il y a urgence. Même si notre consommation reste relativement faible, avec 12 millions de tonnes équivalent pétrole, soit 0,4 TEP/habitant.

On ne dispose pas de ressources d’hydrocarbures. Le salut viendrait du seul potentiel important dont dispose le pays en termes d’énergies renouvelables. Ce potentiel identifié au Maroc repose sur les ressources éoliennes, estimées à plusieurs GW, solaires pour plus de 5kwh/m²/j en moyenne et la biomasse.

Le Maroc recèle d’importantes potentialités en énergies renouvelables. Le rayonnement solaire atteint, selon les experts du HCP, 4,7kwh/j/m2 au Nord et 5,6 au Sud, soit entre 280 et 340 jours par an de soleil. La ressource éolienne, elle, est estimée à un potentiel de 6.000 MW. Selon Allal Reqadi, chef de division distribution et marché électrique au ministère de l’Energie, «le Maroc bénéficie d’un gisement éolien important avec des régions dépassant les 10 m/s de vitesse moyenne annuelle». La zone nord, couvrant Tanger-Tétouan, et la bande côtière allant de Tarfaya à Lagouira présentent des sites exceptionnels avec des vents réguliers et des vitesses moyennes suffisantes pour développer des projets rentables. Où en est-on ?

A fin 2007, on comptabilisait 113 MW d’éolienne, 6 MW de photovoltaïques, 40.000 m2 de capteurs solaires thermiques. Par rapport aux potentialités répertoriées, la capacité actuelle assure à peine 2% de la demande en énergie globale. Ce qui n’altère en rien les atouts certains de ces énergies. Sur le plan économique, elles sont considérées comme potentiellement mobilisatrices des PME et génératrices d’emploi. De plus, elles bénéficient d’une évolution technologique rapide et de plus en plus compétitive.

Les prévisions situent le coût du kwh pour l’éolien à 0,02 euro, soit 0,22 DH, à l’horizon 2010. Cette compétitivité a poussé le Maroc à s’engager dans le développement de cet important potentiel d’énergie propre. Les perspectives de développement des énergies renouvelables devraient aboutir en 2011 à l’exploitation de 1.000 MW éolien, 40 MW solaire thermique et 50 MW biomasse. Ce programme prévoit l’électrification rurale de 10.000 villages, un équipement en énergie renouvelable de 3.000 points d’eau, 400.000 m2 de chauffe-eau solaires et la réalisation d’une économie annuelle de 150.000 TEP (tonne équivalent pétrole) dans le secteur résidentiel et tertiaire et 360.000 TEP dans l’industrie. A cette date, on devrait arriver à 12% d’énergies renouvelables dans le total de la production énergétique pour passer à 19% en 2020 et à plus de 25% en 2030, selon les prévisions du Centre de développement des énergies renouvelables (Cred).

Pour le choix du gaz naturel, l’unanimité est faite sur les avantages qu’offre cette énergie, aussi bien pour le secteur électrique à court et moyen termes que pour le raffinage du pétrole et les activités industrielles. Les professionnels sont également unanimes à souligner que cette ressource est à même de créer un lien entre les marchés régionaux. Mais, pour l’heure, le débat achoppe sur le site devant abriter le terminal gazier, tantôt annoncé à Tanger Med, tantôt sur le port fluvial de Kénitra, tantôt à Mohammédia ou encore à Jorf Lasfar. Bien plus que le choix du site, l’option gaz exige une logistique et un réseau fournisseur, autrement plus compliqués à mettre en place que trouver un site. A noter que la plateforme juridique de tous ces changements annoncés peine à voir le jour: le code gazier est toujours à l’étude. Les autres options, au calepin des pouvoirs publics et largement soufflées par les professionnels, tardent pour certaines à voir le jour. C’est le cas du nucléaire que l’on dit incontournable aujourd’hui. Ne serait-ce que pour constituer une solution à la croissance exponentielle de la demande en électricité liée aux grands chantiers de développement économique. Sur les trois dernières années, la demande a atteint 8,5%. Ce que le directeur général de l’ONE schématise par «tous les ans, c’est une ville comme Rabat ou Seville qui sort de terre». Pour Younès Maâmar, il y a besoin d’augmenter la capacité de production électrique, de transport et de distribution pour accompagner cette croissance. Il estime à plus de 16,5 milliards de DH d’investissement par an pour soutenir ce rythme de croissance et faire face à la demande.

Faut-il miser sur le schiste bitumineux?

«Le Maroc possède des réserves de schistes bitumineux pouvant recéler du pétrole ou de l’huile». Cet appel du pied de nez a fait le tour du monde des professionnels du secteur de l’énergie. L’Office national des hydrocarbures et des mines (Onhym) classe le Royaume à la 6e place mondiale avec un potentiel de 50 milliards de barils à répartir sur trois sites: Tanger, Tarfaya, Timahdit. Pour cette source, la rentabilité est soumise à plusieurs conditions. Cette énergie aurait des caractéristiques spécifiques, nécessitant des choix techniques d’extraction tout aussi spécifiques. Pis encore, les sondages miniers et géologiques, faits sur les gisements découverts dans les années 1970, ne permettent pas encore de déterminer la teneur ni les réserves. Voilà qui rappelle la découverte annoncée avec tambour et trompette du pétrole de Talsint.
10 milliads de compensation
L’augmentation du prix des importations énergétiques a impliqué, à partir de 2003, une augmentation du coût en relation avec le PIB de 2,7% en 2005 et de 3,4% en 2006, calculé selon le nouveau système harmonisé des Nations unies. Qu’en est-il pour 2007?
Le défi financier tient au cours du pétrole. Le baril a triplé, voire plus, entre 2000 et 2007, entraînant une envolée de la facture énergétique rendue plus palpable avec le déficit de la Caisse de compensation. Il est passé de 3,7 milliards de DH à 7,5 milliards entre 2004 et 2006. De combien est-il aujourd’hui? Difficile encore à dire, sachant que ce même baril a atteint 100 dollars en 2007 alors que la loi de Finances 2006 tablait sur un baril à 65 dollars. Selon des sources proches du dossier, les charges de compensation dépasseraient 10 milliards de DH en 2007, au lieu des 8 prévus par le budget.

Sur le plan environnemental, l’Etat a initié des mesures dans le cadre du Plan national d’efficacité énergétique. Un plan pour réaliser une économie d’énergie de 15 à 20% de la consommation globale. Le défi social porte sur la généralisation de l’accès à l’énergie à un coût optimal. Pour gagner ce pari, confiance est faite au Programme d’électrification rurale généralisée (PERG), initié par l’ONE. Au moins quelque chose de concret.

Bachir Thiam
Source: L'Economiste

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