Médias et banlieues: Les cités en ont marre des clichés

Entre médias et habitants des cités, le divorce est consommé. « Nous sommes régulièrement insultés, agressés, témoigne Dorothée Cochard, journaliste à France 2. L’animosité est très forte. ». Les locataires des HLM sont excédés par les amalgames journalistiques qui résument leur cité à une « zone de non-droit » où sévit « la guerre des bandes », « le business sous-terrain » et « l’islam des caves ».

Selon Guy Lochard, spécialiste de sémiologie audiovisuelle et auteur avec Henri Boyer de Scènes de télévision en banlieues (éd. L’Harmattan) les médias en ont fait « l’auberge espagnole du fantasme ». « Tous les maux de la société sont rabattus sur ce lieu symbolique et diabolisé. » Sans parler des quelques bidonnages qui, ces dernières années, ont attisé la défiance. Armes en toc présentées comme un arsenal de guerre sur France 2, trafic de cannabis mis en scène par une chaîne privée ou rajout de barbes dites « islamistes » dans « La marche du siècle ». Pour Karine Bellifa de France 3, « chaque cité a son traumatisme journalistique ».

Dans les rédactions, l’heure est au rachat et à la réhabilitation. « Depuis la présidentielle de 2002, nous essayons d’avoir un traitement plus équilibré en réalisant davantage de sujets “positifs” sur la vie quotidienne », reconnaît Jérôme Soulard de France 2. Exercice ardu. « Tu dois mouiller ta chemise, raconte le journaliste d’un quotidien national. Sans avoir peur. Etre honnête, tout expliquer et surtout prendre du temps. » En télé, fini les reportages à la sauvette. « On évite les plans tournés depuis la voiture, assure Michèle Fines, chef de service à TFI. On se pose et on travaille en profondeur. Cela permet un traitement plus juste. » Christophe Nick s’est imposé la même exigence. Pour ses « Chroniques de la violence ordinaire », diffusées en janvier prochain sur France 2, son équipe a passé deux ans dans une cité de Creil (Oise).

Source: 20 minutes